Randonnée Corse du Sud

La Corse du Sud, cette terre de contrastes où mer azur et montagnes escarpées se rencontrent, offre aux marcheurs un spectacle sans cesse renouvelé. Amoureux des grands espaces depuis mon premier trek sur l’île de Beauté il y a plus de vingt ans, je vous dévoile aujourd’hui les parcours qui m’ont le plus marqué. Ces sentiers, tantôt sauvages, tantôt confidentiels, révèlent l’âme profonde de cette région. Entre pinèdes odorantes et criques secrètes, préparez-vous à découvrir une facette authentique de la Méditerranée que seuls les randonneurs ont le privilège d’apercevoir.

RandonnéeLocalisationDifficultéDuréePoints forts
Sentier des douaniers de BonifacioBonifacioFacile à modérée3-4hFalaises calcaires, vues sur la mer, escalier du Roi d’Aragon
Aiguilles de BavellaAlta RoccaModérée4-5hFormations rocheuses rougeâtres, arche du « Trou de la Bombe », forêt de pins laricio
Lacs de Melo et CapitelloMassif du Monte RotondoModérée à difficile5-6hLacs d’altitude cristallins, paysages alpins, névés en début de saison
Calanques de PianaGolfe de PortoModérée3hFormations rocheuses rouges classées UNESCO, contrastes mer/montagne
Mare a Mare SudTraverse l’île d’est en ouestModérée à difficile5-7 joursGrande traversée, diversité de paysages, villages traditionnels
Plateau du CuscionuAlta RoccaFacile à modérée5hGrands espaces d’altitude, pozzines, bergeries traditionnelles, flore unique
Forêt d’AïtonePrès d’ÉvisaFacile2-3hPins laricio centenaires, fraîcheur, ruisseaux et vasques naturelles
Cascade des AnglaisVallée du FangoFacile1h30 A/RBaignade en eau douce, vasques naturelles, fraîcheur estivale
Sentier des crêtes du Cap CorsePéninsule du Cap CorseModérée à difficileVariable (1 à 5 jours)Vues panoramiques sur les deux côtes, tours génoises, flore méditerranéenne

Le sentier des douaniers de Bonifacio

Suspendu entre ciel et mer, le sentier des douaniers de Bonifacio constitue l’une des plus spectaculaires randonnées côtières d’Europe. Ce parcours historique, autrefois emprunté par les garde-côtes pour surveiller les trafics maritimes, serpente aujourd’hui sur environ 12 kilomètres le long de falaises vertigineuses.

L’itinéraire débute au pied de la cité médiévale, près du port. Dès les premiers pas, la magie opère instantanément. Les formations calcaires, sculptées par les embruns et les tempêtes depuis des millénaires, plongent à pic dans une mer d’un bleu saisissant. L’érosion a créé des grottes marines et des arches naturelles qu’on aperçoit depuis les belvédères aménagés sur le parcours.

Au fur et à mesure de l’avancée vers le phare de Pertusato, le panorama s’élargit pour dévoiler les îles Lavezzi au loin. Ces sentinelles granitiques émergent des flots turquoise, témoins silencieux des nombreux naufrages qui ont marqué l’histoire de ce détroit capricieux.

Le point d’orgue de cette randonnée demeure l’escalier du Roi d’Aragon, taillé dans la falaise selon la légende en une seule nuit par les troupes aragonaises. Ces 187 marches à flanc de précipice offrent une expérience aussi vertigineuse qu’inoubliable.

La biodiversité qui accompagne chaque pas mérite qu’on s’y attarde. Entre les plantes endémiques corses comme l’immortelle aux parfums de curry et les oiseaux marins qui nichent dans les parois, l’œil du naturaliste sera comblé. Les plus attentifs apercevront peut-être le faucon pèlerin en chasse ou le goéland d’Audouin, espèce rare de Méditerranée.

L’idéal est de parcourir ce sentier tôt le matin, quand les premiers rayons du soleil illuminent la pierre calcaire d’une lumière dorée. En été, prévoyez chapeau et réserve d’eau conséquente, car l’ombre se fait rare et la réverbération intense.

Les aiguilles de Bavella

Majestueuses et intimidantes, les aiguilles de Bavella dominent l’Alta Rocca de leurs silhouettes déchiquetées. Ces pics granitiques rougeoyants, culminant à près de 1900 mètres d’altitude, offrent un cadre grandiose pour les amateurs de randonnée alpine. Le massif abrite plusieurs sentiers de difficulté variable, mais le circuit classique du « Trou de la Bombe » reste le plus accessible et complet.

Au départ du col de Bavella, facilement repérable grâce à la statue de Notre-Dame des Neiges qui veille sur les voyageurs, le sentier s’enfonce dans une forêt de pins laricio. Ces géants corses, endémiques de l’île, peuvent atteindre 50 mètres de hauteur et vivre plusieurs siècles. Leur écorce rougeâtre et leurs branches tortueuses créent une ambiance presque mystique, surtout lorsque la brume matinale s’accroche aux troncs.

Après environ une heure de marche, la forêt s’éclaircit pour laisser place à un paysage minéral saisissant. Les aiguilles se dressent alors dans toute leur splendeur, révélant des formes fantasques que les locaux ont baptisées selon leur imagination : l’Homme de Cagna, le Doigt de Dieu ou encore le Carlantone. La légende raconte que ces rochers seraient des bergers pétrifiés pour avoir défié les dieux.

Le sentier contourne ensuite ces monuments naturels pour mener au fameux « Trou de la Bombe », une arche naturelle formée par l’effondrement partiel d’une paroi. Photographes, préparez vos appareils : le cadrage parfait existe bel et bien, avec les aiguilles en arrière-plan dans l’ouverture de l’arche.

La diversité botanique du massif surprend même les connaisseurs. Entre les aulnes odorants qui embaument l’air de leurs effluves citronnés et les pivoines sauvages qui éclatent de rouge au printemps, chaque saison révèle de nouvelles merveilles. L’automne, particulièrement, transforme les versants en palettes de couleurs flamboyantes lorsque les feuillus se parent d’or et de pourpre.

Niveau sportif, cette randonnée présente un dénivelé modéré d’environ 600 mètres, mais le terrain rocheux demande une attention constante. Comptez 4 à 5 heures pour boucler le circuit complet, pauses contemplatives incluses. L’hiver, les aiguilles se couvrent parfois de neige, offrant un contraste saisissant entre blanc immaculé et rouge minéral.

Les lacs de Melo et Capitello

Dans le massif du Monte Rotondo, deuxième plus haut sommet de Corse, s’épanouissent deux merveilles lacustres aux eaux cristallines : Melo et Capitello. Ces lacs d’origine glaciaire constituent une destination prisée des marcheurs en quête de fraîcheur estivale et de panoramas alpins.

L’aventure commence au parking de Castellu di Vergio, à environ 1400 mètres d’altitude. Dès les premiers kilomètres, le sentier traverse une forêt de hêtres et de pins, refuge de la faute forestière corse. L’ombre bienfaisante des grands arbres accompagne les randonneurs jusqu’à la bergerie de Grotelle, où le paysage s’ouvre progressivement.

Au-delà de ce point, la végétation se fait plus rare et l’ambiance plus minérale. Le chemin s’élève alors par paliers successifs, révélant à chaque ressaut de nouvelles perspectives sur la vallée en contrebas. Les photographes apprécieront particulièrement la qualité exceptionnelle de la lumière matinale qui caresse les rochers de granite.

Après environ deux heures d’ascension régulière, le lac de Melo se dévoile soudain, niché dans un cirque rocheux à 1711 mètres d’altitude. Sa forme presque parfaitement circulaire et ses eaux d’un bleu profond créent un tableau naturel hypnotique. Selon la saison, des névés persistent parfois sur les berges, ajoutant une touche alpine au paysage.

Pour les marcheurs motivés, l’ascension peut se poursuivre jusqu’au lac de Capitello, situé 100 mètres plus haut. Un passage équipé de chaînes facilite la progression sur une section rocheuse plus technique. L’effort supplémentaire est largement récompensé : plus sauvage et moins fréquenté que son voisin, Capitello offre une solitude contemplative rare dans les montagnes corses en été.

La faune aquatique de ces lacs surprend par sa capacité d’adaptation aux conditions extrêmes. La truite fario, introduite au siècle dernier, s’y développe malgré les eaux froides et les longs mois sous la glace. Plus discrets, des amphibiens endémiques comme le discoglosse corse trouvent refuge dans les zones humides périphériques.

Niveau pratique, cette randonnée requiert une bonne condition physique mais reste accessible à la plupart des marcheurs. Le dénivelé positif atteint environ 700 mètres jusqu’à Melo et 800 mètres jusqu’à Capitello. En été, partez tôt pour éviter l’afflux touristique et préservez ces lieux fragiles en remportant tous vos déchets.

Les calanques de Piana

Classées au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1983, les calanques de Piana constituent un phénomène géologique extraordinaire et l’une des plus belles curiosités naturelles de Méditerranée. Ces formations rocheuses de granite rouge, sculptées par l’érosion marine et éolienne, évoquent des silhouettes fantastiques qui enflamment l’imagination.

Le sentier pédestre qui les traverse offre une alternative idéale à la route sinueuse D81. Au départ du village de Piana, perché à 440 mètres d’altitude, le chemin plonge progressivement vers la mer en suivant d’anciennes voies muletières. L’ocre des rochers contraste magnifiquement avec le bleu céruléen de la Méditerranée et le vert profond des maquis environnants.

La magie de cette randonnée réside dans la métamorphose constante du paysage au fil des heures. Selon l’angle du soleil, les calanques révèlent des nuances insoupçonnées, passant du rose tendre à l’aurore au rouge flamboyant au couchant. Les photographes privilégieront la fin d’après-midi, lorsque la lumière rasante accentue les reliefs torturés du granite.

Plusieurs belvédères aménagés ponctuent le parcours, offrant des points de vue exceptionnels sur les formations les plus célèbres. Parmi elles, « la tête de chien » et « le cœur » comptent parmi les plus reconnaissables. En scrutant attentivement les parois, on distingue parfois des animaux pétrifiés ou des visages fantomatiques figés dans la roche depuis des millénaires.

La végétation qui s’accroche aux interstices rocheux mérite qu’on s’y attarde. Entre les touffes d’immortelles au parfum entêtant et les cistes ladanifères aux fleurs blanches éphémères, la flore méditerranéenne déploie ses trésors adaptés à la sécheresse et aux embruns. Au printemps, les couleurs explosent littéralement, transformant les versants en jardins suspendus.

Pour profiter pleinement de cette randonnée, comptez environ 3 heures aller-retour depuis Piana jusqu’à la calanque de Ficajola. Cette petite plage de galets nichée entre les falaises offre une halte rafraîchissante et une perspective étonnante sur les calanques vues depuis la mer. Les plus téméraires pourront même s’y baigner, mais attention aux courants parfois vigoureux.

Mare a Mare Sud

Véritable épine dorsale pédestre de l’île, le Mare a Mare Sud relie la côte orientale à la côte occidentale en traversant des paysages d’une diversité stupéfiante. Cet itinéraire de grande randonnée, long d’environ 77 kilomètres, propose une immersion totale dans la Corse authentique, loin des stations balnéaires surpeuplées.

Le parcours traditionnel débute à Porto-Vecchio, sur la côte tyrrhénienne, pour s’achever à Propriano, face à la mer Ligure. Entre ces deux points, cinq à sept jours de marche (selon le rythme adopté) permettent de découvrir successivement des maquis odorants, des forêts primaires, des villages perchés et des zones montagneuses préservées. Chaque étape révèle un nouveau visage de cette île aux multiples facettes.

L’une des principales richesses du Mare a Mare Sud réside dans les rencontres humaines qu’il favorise. Les villages traversés comme Quenza, Serra-di-Scopamène ou Santa-Lucia-di-Tallano perpétuent des traditions séculaires que les habitants partagent volontiers avec les randonneurs curieux. Ne manquez pas de goûter la charcuterie locale, le fromage de brebis affiné ou les canistrelli, ces biscuits secs parfumés à l’anis ou au citron.

Sur le plan naturel, la diversité des écosystèmes traversés impressionne même les randonneurs expérimentés. Les forêts de chênes-lièges de l’Alta Rocca abritent une faune discrète mais riche, incluant le mouflon corse, emblème sauvage de l’île. Plus rare, la sittelle corse, seul oiseau véritablement endémique, niche exclusivement dans les pins laricio qu’on rencontre en altitude.

L’histoire a également laissé son empreinte sur ce sentier millénaire. Anciennes voies commerciales, moulins à eau abandonnés, ponts génois et bergeries en ruines témoignent d’un riche passé agropastoral. Certains tronçons suivent d’anciennes pistes muletières pavées, utilisées pendant des siècles pour relier les communautés montagnardes aux ports côtiers.

Niveau logistique, le Mare a Mare Sud présente l’avantage d’être bien balisé (marques orange) et de proposer des hébergements à chaque étape. Gîtes d’étape, refuges ou chambres chez l’habitant permettent de voyager léger, sans tente ni réchaud. La meilleure période s’étend de mai à octobre, en évitant si possible juillet-août pour échapper à la chaleur excessive et à la surfréquentation.

Le plateau du Cuscionu

Vaste étendue d’altitude située entre 1400 et 1700 mètres, le plateau du Cuscionu représente le plus grand espace pastoral de Corse. Ce paysage ouvert, ponctué de pozzines (petites zones humides), de blocs erratiques et de pins laricio isolés, offre une expérience de randonnée unique, entre alpage suisse et savane africaine.

L’accès principal se fait depuis le village de Zicavo, par une route forestière menant au refuge d’Usciolu. De là, plusieurs itinéraires permettent d’explorer les vastes étendues du plateau. Le circuit des bergeries reste le plus populaire, offrant en une journée un aperçu complet des richesses naturelles et culturelles du site.

Au printemps et en début d’été, le plateau se transforme en jardin botanique naturel d’une richesse exceptionnelle. Plus de 200 espèces végétales y ont été recensées, dont certaines endémiques strictes comme la cardamine de Corse ou le myosotis de Soleirol. Les crocus et les jonquilles créent parfois de véritables tapis colorés qui contrastent avec le vert tendre des herbages.

L’activité pastorale, encore bien présente sur le plateau, perpétue des techniques d’élevage ancestrales. De mai à octobre, bergers et troupeaux investissent les lieux, occupant des bergeries en pierre sèche dont certaines remontent au XVIIe siècle. La rencontre avec ces gardiens de tradition constitue souvent un moment fort pour les randonneurs, notamment lorsqu’ils assistent à la fabrication du brocciu, fromage frais emblématique de l’île.

La faune sauvage, bien que discrète, se laisse parfois observer par les marcheurs patients. À l’aube ou au crépuscule, les cerfs corses viennent s’abreuver aux sources qui parsèment le plateau. Plus communs, les cochons semi-sauvages fouillent constamment le sol à la recherche de racines et de châtaignes. Dans le ciel, busards et aigles royaux dessinent d’amples cercles, scrutant les moindres mouvements au sol.

Niveau géologique, le plateau du Cuscionu raconte l’histoire des glaciations quaternaires qui ont modelé le relief corse. Les blocs granitiques épars, appelés localement « petre strette », témoignent du travail des glaciers disparus. Certains de ces rochers présentent des cupules énigmatiques probablement creusées par l’homme préhistorique à des fins rituelles.

Pour profiter pleinement de cette randonnée, privilégiez les mois de juin ou septembre. Vous éviterez ainsi la chaleur excessive de l’été tout en bénéficiant d’une météo généralement clémente. L’itinéraire classique demande environ 5 heures de marche effective pour une boucle de 12 kilomètres, avec un dénivelé modéré.

La forêt d’Aïtone

Cathédrale végétale aux colonnes centenaires, la forêt d’Aïtone abrite les plus beaux spécimens de pins laricio de l’île. Ces conifères majestueux, pouvant atteindre 50 mètres de hauteur et vivre plus de 500 ans, créent un écosystème unique classé en réserve naturelle depuis 1975.

L’exploration de ce sanctuaire forestier débute généralement à la maison forestière d’Aïtone, facilement accessible depuis Évisa. Un réseau de sentiers bien entretenus permet de s’immerger progressivement dans l’ambiance feutrée et fraîche de ce monde verdoyant. La lumière filtrée à travers la canopée crée des jeux d’ombre et de clarté propices à la contemplation.

Le sentier botanique, particulièrement recommandé pour une première visite, offre sur 3 kilomètres un condensé des richesses naturelles locales. Des panneaux didactiques jalonnent le parcours, expliquant les particularités des différentes essences et leur rôle dans l’écosystème. Outre les pins laricio emblématiques, on découvre des hêtres centenaires, des ifs millénaires et des érables de Montpellier aux couleurs flamboyantes en automne.

La dimension historique ajoute une couche de lecture fascinante à cette randonnée. Depuis l’Antiquité, les forêts corses ont fourni du bois d’œuvre de qualité exceptionnelle, notamment pour la construction navale. Certains des pins que l’on croise auraient pu, sans leur statut protégé, devenir mâts de navires ou charpentes de cathédrales. Des vestiges d’anciennes charbonnières témoignent également de l’exploitation intensive de ces ressources avant l’ère du pétrole.

L’eau constitue un autre élément omniprésent dans la forêt d’Aïtone. Le ruisseau éponyme creuse son lit entre les rochers granitiques, formant par endroits des vasques naturelles cristallines où il fait bon se rafraîchir en été. Le pont de Zaglia, petit ouvrage en pierre du XVIIIe siècle, offre un point de vue pittoresque sur l’une des plus belles sections du cours d’eau.

La faune forestière, bien que discrète, réserve parfois de belles surprises aux observateurs patients. Le pic épeiche tambourine régulièrement contre les troncs à la recherche d’insectes, tandis que l’autour des palombes surveille son territoire depuis les plus hautes branches. Plus rare, la sitelle corse, petit passereau endémique facilement reconnaissable à son ventre roux, niche exclusivement dans les vieux pins laricio.

Pour les randonneurs plus ambitieux, le sentier de la Spelunca permet de rejoindre le village d’Ota à travers des gorges spectaculaires. Cette variante plus sportive (comptez 5 à 6 heures de marche) offre un contraste saisissant entre l’ambiance humide et fraîche de la forêt et les parois arides et minérales des gorges.

La cascade des Anglais

Nichée dans l’écrin verdoyant de la vallée du Fango, classée réserve de biosphère par l’UNESCO, la cascade des Anglais représente une destination idéale pour allier randonnée et baignade. Ce site enchanteur, accessible par un sentier relativement facile, récompense les marcheurs par ses eaux limpides et ses vasques naturelles sculptées dans le granite.

L’itinéraire débute au pont de Tuarelli, sur la D351, à environ 8 kilomètres de Galéria. Un parking aménagé permet de laisser son véhicule en toute sécurité avant d’emprunter le sentier qui remonte la rive gauche du Fango. Dès les premiers pas, la fraîcheur bienfaisante émanant de la rivière crée un microclimat particulièrement apprécié lors des chaudes journées estivales.

Le chemin, bien que parfois caillouteux, reste accessible à la plupart des marcheurs, y compris aux familles avec enfants. Il serpente sous une canopée d’aulnes glutineux et de chênes verts qui procurent une ombre salvatrice. Par endroits, des trouées dans la végétation offrent des échappées visuelles sur les eaux cristallines du Fango qui cascadent entre les rochers polis.

Après environ 40 minutes de marche tranquille, le grondement caractéristique de la cascade se fait entendre avant même qu’elle n’apparaisse. Puis soudain, au détour d’un virage, le rideau végétal s’écarte pour révéler ce petit joyau naturel : une chute d’eau d’une dizaine de mètres se déversant dans une piscine naturelle parfaitement circulaire. Le site doit son nom aux officiers britanniques qui, pendant l’occupation anglaise de la Corse (1794-1796), venaient s’y rafraîchir.

La baignade constitue évidemment l’activité phare des lieux. L’eau, filtrée naturellement par les roches granitiques, atteint une pureté remarquable tout en conservant une fraîcheur revigorante même au cœur de l’été. Les plus téméraires s’amuseront à plonger depuis les rochers environnants, tandis que les amateurs de farniente préféreront s’allonger sur les dalles de granite chauffées par le soleil.

Au-delà de ses attraits récréatifs, le site présente un intérêt écologique majeur. La vallée du Fango abrite une biodiversité exceptionnelle, avec notamment la présence de la célèbre truite macrostigma, espèce endémique corse considérée comme l’ancêtre de toutes les truites méditerranéennes. Plus discrètes mais tout aussi fascinantes, les libellules et demoiselles virevoltent au-dessus des zones humides périphériques.

Pour préserver ce petit paradis, quelques règles élémentaires s’imposent : remporter tous ses déchets, éviter les savons et shampoings même biodégradables, et respecter la tranquillité des lieux. En haute saison (juillet-août), privilégiez les visites matinales ou tardives pour échapper à l’affluence et communier plus intimement avec cette nature généreuse.

Le sentier des crêtes du Cap Corse

Épine dorsale de la péninsule du Cap, culminant par endroits à plus de 1300 mètres d’altitude, le sentier des crêtes offre une expérience de randonnée exceptionnelle entre deux horizons marins. D’un côté, la mer Tyrrhénienne s’étend à l’infini vers l’Italie ; de l’autre, la côte occidentale plus sauvage plonge dans les eaux profondes de la Méditerranée.

L’itinéraire complet, qui suit l’ancienne piste des douaniers, s’étire sur près de 80 kilomètres depuis Macinaggio au nord-est jusqu’à Centuri au nord-ouest. La plupart des randonneurs optent cependant pour des sections plus courtes, comme le tronçon entre le col de Sainte-Lucie et la tour génoise de Sénèque, facilement réalisable en une journée.

Ce qui frappe immédiatement sur ce parcours, c’est la perception simultanée des deux façades maritimes de l’île. Cette double exposition crée des contrastes saisissants : tandis que la côte orientale, plus douce, aligne criques secrètes et plages de sable fin, le versant occidental se caractérise par des falaises abruptes et une mer souvent plus agitée. Les photographes apprécieront particulièrement cette dualité paysagère, surtout à l’aube ou au crépuscule lorsque les jeux de lumière subliment les reliefs.

La végétation qui accompagne le marcheur reflète parfaitement cette dichotomie géographique. Le versant est, plus abrité, accueille une flore méditerranéenne classique dominée par le maquis aromatique et les chênes verts. À l’ouest, battu par les vents marins chargés de sel, se développe une végétation plus rase et adaptée aux conditions extrêmes. En mai et juin, les cistes, les lavandes maritimes et les immortelles transforment les pentes en jardins odorants aux couleurs éclatantes.

Le patrimoine culturel ponctue agréablement l’itinéraire. Anciennes bergeries en pierre sèche, fours à pain communautaires et moulins à vent témoignent d’une vie rurale autrefois florissante malgré l’isolement. Plus spectaculaires, les tours génoises érigées entre le XVIe et le XVIIe siècle formaient un système de défense côtière contre les incursions barbaresques. Certaines, parfaitement restaurées, offrent d’excellents points de vue panoramiques et des abris bienvenus en cas d’intempéries.

La faune sauvage, bien que discrète, révèle parfois sa présence aux randonneurs attentifs. Les rapaces, particulièrement nombreux, profitent des courants ascendants pour planer majestueusement le long des crêtes. Aigle royal, faucon pèlerin et balbuzard pêcheur comptent parmi les espèces emblématiques qu’on peut observer avec un peu de patience et de chance.

Au niveau pratique, ce sentier présente un dénivelé significatif mais reste accessible aux marcheurs réguliers. Prévoyez de bonnes réserves d’eau, car les sources se font rares sur les crêtes, particulièrement en été. Le balisage, régulièrement entretenu par les associations locales, suit les marques rouge et blanc du GR20. La période idéale s’étend de mai à octobre, avec une préférence pour les mois de mai-juin ou septembre-octobre pour éviter les fortes chaleurs estivales.